communiqué
Pour sa 50ème référence en 20 ans d’existence,Herzfeld publie un de ses disques les plus singuliers, à la fois moderne et primitif, inconfortable et réconfortant, noir et blanc.
La recette est pourtant simple, minimaliste :quelques arrangements, un rythme, une voix.
Sèches, abrasives, implacables, les percussions électroniques aux profondes basses distordues évoquent une machine qui déconstruit et reconstruit sans relâche. Les synthétiseurs noisy-catchy cisèlent l’édifice en alternant crissements et nappes apaisantes. Quelques figures de basse électrique et de samples dynamisent les lignes. L’ensemble doit autant à la trap crépusculaire contemporaine de Pop Smoke qu’aux mécaniques dystopiques d’Autechre ou de Throbbing Gristle.
Fragile mais assumée, légèrement robotisée mais sensible, la voix condense l’humanité du disque. Par l’emploi du « tu » omniprésent, elle établit un lien troublant, intime, avec qui l’écoute. De par la musicalité des mots dits, les motifs et les mélodies de ce parlé-chanté à mi-chemin entre Daho et Michniak s’inscrivent insidieusement dans la mémoire.
Il n’était pourtant pas évident que cette espèce de chanson industrielle voit le jour : auteur-compositeur-interprète-producteur d’Excalibur, Olivier Stula avait jusqu’ici joué de la basse et des claviers au sein d’A Second of June (2006-2019) et du Herzfeld Orchestra, plus récemment de la guitare dans Récréation, et exploré en solitaire depuis 2014 le monde des synthétiseurs analogiques et modulaires, des musiques électroniques instrumentales, sous le nom de Vaillant.
Il a fallu attendre l’isolement du confinement de 2020 pour le voir contraint à poser sa propre voix sur les deux premières démos du successeur de l’album Mirage Orange (2019), dont l’une deviendra « Prince De Perse », single numérique paru en 2021, réarrangé depuis pour le présent disque. Mais c’est surtout « Excalibur », placé ici en ouverture, qui indiquera la direction esthétique à suivre : comme frappé du sceau du destin, le motif rythmique du morceau lui apparaît en rêve et semble fait pour accueillir le texte déjà en grande partie écrit.
Ce désir constant de ne pas répéter une formule d’un projet à l’autre, de réinventer sa musique, transparaît également dans les deux relectures qui figurent sur l’album : produit par Joe Meek en 1964, « Little Baby » des Blue Rondos se mue en « Petit Amour », et, avec la participation de Raphaëlle Albane (Marra, ex-Sinaïve) au chant, Programme se transforme en Suicide 2.0 sur « N’importe Quoi ».
Si les relations sociales et surtout amoureuses apparaissent au long du disque comme des entreprises de destruction ou de création, Vaillant finit par proposer sur le morceau final, dans un chaos rap rave et black metal, une remise à zéro, un renouvellement total.